Conseils de MA HaiLong, responsable actuel de l’association de Shanghaï du TaiJi de style WU
10 points importants pour la pratique du TaiJiQuan
La vitalité est un aspect important de lʼentraînement du TaiJiQuan. Améliorer la vitalité implique de se concentrer sur 10 points à lʼentraînement :
1. Etre centré
Le centre est le lieu qui ne bouge pas lors de lʼouverture et de la fermeture, du déploiement et du repliement. Au cours de la pratique du TaiJiQuan il faut garder pour visée de rester centré dans lʼensemble du corps. Il y a deux aspects à considérer : — La posture corporelle ; dans le classique “Le chant des treize mouvements fondamentaux” il est dit : “le coccyx est centré et aligné et lʼesprit (shen) atteint le sommet de la tête.” Ici le dos sert de support et de cette manière on garde le centre et lʼon est aligné. En suivant lʼimage qui consiste à être suspendu “par le sommet de la tête” la mâchoire inférieure sʼabaisse légèrement. Ainsi la respiration se fait aisée et fluente, et si lʼon respire pleinement dans le ventre et la poitrine, le cœur/conscience (xin) et le qi sont centrés et harmonieux. — Lʼéquilibre central ; Lʼéquilibre central est maintenu non seulement dans la posture statique mais aussi dans les mouvements, cʼest à dire dans les 5 sortes de pas. Que lʼon avance, recule, regarde à gauche ou à droite, on doit toujours garder lʼéquilibre central et ne pas faire lʼerreur de se pencher sur le côté, en avant ou en arrière.
2. Etre aligné
Dans chaque posture il faut faire de son mieux pour être tout à fait aligné. Il faut éviter de se tenir plié ou tordu. A chaque mouvement il faut tout le temps rester stable. On ne se penche ni en avant ni en arrière. Si le centre est stable, il est facile dʼouvrir et de fermer. Dans le cas contraire on commet lʼerreur de “ne pas différencier clairement le plein (shi) et le vide (xu)”.
3. Détermination, fermeté
La détermination est en lien avec “le calme sans mouvement”. On doit sʼefforcer dʼatteindre un esprit ferme. Dans le livre du “Grand apprentissage (Daxue)” il est dit : “Si lʼon sait où aller, on est ferme”. Cela signifie que lʼon est ferme lorsquʼon a conscience de ce que lʼon veut. La détermination se traduit par : « le cœur/conscience (xin) et le qi sont clairs et harmonieux. La vitalité pénètre partout. » Cʼest lʼune des racines du Taoïsme. Lorsquʼon pratique le TaiJiQuan, la vitalité doit être protégée au moyen de la clarté, de la paix et de la non-action (wuwei). Elle ne doit pas être altérée par le monde extérieur. Dans les “Discussions célèbres de Shen Hui (Shen Hui Yulu)" la détermination est explicitée de la façon suivante : “Dès que lʼon est ferme, on est perspicace. Dès que lʼon est perspicace, on est aussi ferme”.
4. Douceur
La signification de la douceur est dʼéviter absolument dʼêtre dirigé par la dureté. Il faut déployer les mouvements dans la continuité et lʼaisance au travers du naturel (ziran), sans sensation de raideur ni de stagnation.
5. Calme
Le calme veut dire quʼon sʼefforce de se concentrer entièrement sur la vitalité. Il y a de très nombreuse explications au terme de ʻcalmeʼ dans la philosophie chinoise. Dans le livre du “Grand apprentissage” il est dit : “Si lʼon sait où aller, on est ferme. Si lʼon est ferme, on devient calme. Si lʼon possède le calme, on est en paix”. Dans le TaoTeKing (Daodejing) de Laozi il est dit : « Accomplir le vide extrême (xu). Garder le calme complet. Les dix mille choses (wanwu) prospéreront. Je peux les voir revenir. » Dans le bouddhimse il est dit : "Si lʼesprit est clair et tranquille, le calme apporte la perspicacité et la perspicacité produit la sagesse.” Dans les diverses pensées que contient la philosophie chinoise classique, le calme est un idéal élevé. Quelle que soit lʼécole à laquelle on appartient, on doit réaliser ce stade important. Dans la pratique du TaiJiquan on parle du calme selon trois visées :
- Le calme corporel
Le calme corporel est dʼune grande importance. il conduit à la tranquillité et à la respiration profonde. Cʼest aussi ce qui est signifié quand on dit “Le qi sʼenfonce dans le Dantian”. Dans la pensée chinois trois sortes de Dantian sont différenciés. Le Dantian inférieur est dans la partie ventrale immédiatement sous le nombril. Le Dantian médian est à lʼintérieur de la zone de la poitrine et le Dantian supérieur est entre les sourcils. Lorsque le calme est dans le corps, le qi et donc le souffle peuvent naturellement (ziran) sʼenfoncer dans le Dantian. Cette idée est aussi présente dans le concept de vitalité.
- Le calme du cœur/conscience (xin)
Dans la chine ancienne le cœur/conscience (xin) est étroitement associé à la vitalité. Les mouvements du TaiJiQuan sont pleins de légèreté et dʼagilité. Cʼest une expression de la concentration de vitalité et un résultat du calme du cœur/conscience (xin).
- Le calme de lʼesprit
Le calme de lʼesprit est rattaché à la relaxation naturelle (ziran) du corps. Cela correspond au stade avancé de lʼagir au travers du non-agir (wuwei) quʼil est très difficile dʼatteindre. Il faut pratiquer assidûment et longtemps et cela requiert la perspicacité la plus profonde.
6. Légèreté et agilité
La légèreté est à lʼopposé de la lourdeur. Cʼest une importante caractéristique de lʼart martial du TaiJiQuan. On peut aussi comprendre la légèreté comme étant la douceur. Dans “Lʼéclaircissement mental des 13 mouvements fondamentaux” il est dit : « Lʼextrême douceur conduit à lʼextrême dureté”. De plus les mouvements sont dessinés avec agilité. Tous les mouvements sont coordonnés. En chinois lʼagilité a aussi le sens de sensibilité. Aussi, si lʼon est léger et agile, on peut se détendre et sʼenfoncer. De cette façon dans les exercices avec un partenaire on peut contrôler en collant et en adhérant, ce qui permet de suivre et dʼêtre relié sans sʼégarer ni résister. Cependant la légèreté ni lʼagilité ne signifient aucunement sans soin ou sans considération. On ne doit pas faire dʼémission de force explosive car cela pourrait causer lʼerreur du double poids. Lʼabsence de soin et le double poids sont deux grosses erreurs dans la pratique du TaiJiQuan et doivent toujours être évitées. Lors des coups de poings et de paumes ainsi que dans les coups de pieds les membres sʼétendent mais ne sont jamais poussés complètement ni rendus durs. Aussi est-il dit encore : »La puissance semble relâchée mais ne lʼest pas. La puissance est prête à sʼouvrir mais ne sʼouvre pas."
7. Etre relié
Au TaiJiQuan tous les mouvements sont reliés. La connexion des mouvements doit être parfaite et sans erreur. De ce fait la lenteur est un aspect important. La quête de lenteur et de connexion est un objectif ambitieux au Taijiquan : "La boxe longue coule continûment comme un grand fleuve et comme la mer”
8. Rondeur et vivacité
Lors de lʼexercice du TaiJiQuan on fait des mouvements circulaires des mains et des jambes. Dans les pas, on se déplace au moyen dʼarcs circulaires. On ne devrait pas aller directement en avant ou en arrière. La vivacité a le sens dʼagilité. Trois aspects doivent être discutés : — Les mouvements doivent être complètement ronds. Rien nʼest saillant, ne sʼaffaisse ou nʼest interrompu. tout est fondu en une totalité harmonieuse. - Lʼagilité et lʼabsence de saisie sont dʼune grande importance. Se déployer et se replier, ouvrir et fermer, avancer et reculer, vers le haut et vers le bas — tout ceci se déroule librement et sans entrave. - La rondeur se développe autour de lʼaxe de la taille. Tourner se fait alors prestement et bras et jambes ont lʼespace de se mouvoir. Ceci ressemble tout à fait à la relation entre une roue et son axe. Cette relation ne doit pas être détruite sinon les mouvements tombent dans le désordre.
9. Consciencieusement
Faire consciencieusement comporte deux aspects importants :
- Le premier est le sérieux. On sʼefforce très sérieusement dʼatteindre une réelle et profonde capacité. En aucune circonstance on ne prend les choses à la légère. Chacun des mouvements doit être précis et sans faute. Il est aussi dit : “Si lʼon se concentre entièrement sur un point, alors tout est renforcé”.
- Le second consiste à sonder profondément quelque chose. Un vieux dicton affirme : “comme cʼest coupé, cʼest limé ; comme cʼest limé, cʼest ciselé ; comme cʼest ciselé, cʼest poli”. Pour sonder quelque chose il faut pratiquer et réfléchir profondément. Cʼest aussi un plaisir, explique Confucius dans les “Analectes” : "Apprendre et répéter de nombreuses fois ce qui est appris nʼest-ce pas aussi un plaisir ?”
10. Persévérance
La persévérance possède aussi deux aspects :
- Le premier est lʼopiniâtreté. Dans le froid ou la chaleur étouffante, on nʼinterrompt pas lʼentraînement. Cela veut donc dire : "On pratique aussi au plus chaud de lʼété comme au plus froid de lʼhiver.”
- Dans son second aspect la persévérance se rapporte à une certaine durée dʼentraînement. On peut accroître ses efforts progressivement, quels que soient initialement sa condition et son niveau. Il est important de ne pas se hâter. La durée dʼentraînement peut être, par exemple, de 45 — 60 minutes. Cela devrait inclure un dur labeur sur les fondementaux. Ce nʼest quʼainsi quʼon peut atteindre de hautes capacités.
Auteur : Ma Hailong (frère aîné de Ma Jiangbao et président de lʼassociation du Taiiquan de Jianquan de Shanghai). Edité par Kit Gerould, traduit par Martin Boedicker puis en français par Vincent Béja.