Nous venons d’apprendre que Martin Bödicker, un des acteurs principaux du style Wu en Allemagne et en Europe continentale, est décédé. Du fait de problématiques familiales, ce décès qui remonte à 4 ans maintenant, vient seulement d’être rendu public.
J’ai connu Martin quand il était encore étudiant en chimie à Düsseldorf et qu’il s’affairait avec quelques compagnons à organiser des stages d’été pour Ma JiangBao en Pologne.
- Ma JiangBao
C’est avec son aide et celui de sa compagne Freya que j’ai pu me rendre en 1993 à Kazimierz sur la Vistule au sud est de Varsovie alors que tout en Pologne était encore désorganisé.
C’est encore auprès de lui que je me suis tourné avec Luc Bernard pour apprendre la forme rapide quelques années plus tard.
- Ge XianZhong
Ge XianZhong mon maître chinois qui vivait à Lindau était alors reparti à Canton. Je me suis heurté à la rigidité de Martin. Nous avions pratiqué ensemble, déjeuné ensemble et fait un court séjour dans son appartement de Düsseldorf où il vivait avec Freya et leur fils encore tout bébé… J’avais initialement, tout comme Martin, appris la forme lente de Ma JiangBao mais j’avais évolué et modifié ma pratique sur les conseils insistants et précis de Ge qui avait été disciple de Ma YuehLiang, le père de Ma JiangBao. Hélas il n’était pas question pour Martin d’accepter d’enseigner à quelqu’un qui ne pratiquait pas exactement comme lui… Nous en restâmes-là.
En Martin vivait certainement la forte et louable ambition de devenir un maître de Taijiquan occidental ou tout au moins un pratiquant de référence. Malheureusement il faisait aussi en sorte d’écarter ses condisciples pour s’imposer comme le premier disciple de Ma et cela créait du ressentiment. Ses comportements envers son entourage, son ambition d’être l’unique fils spirituel de Ma JiangBao avaient à cette époque fini de me le rendre antipathique. Par ailleurs, d’après ma modeste expérience, Ma JiangBao avait indéniablement une bonne technique mais il n’avait pas la qualité et la finesse de contact que j’avais trouvée chez Ge XianZhong, puis chez Wang HaoDa et que je finirai par retrouver quelques années plus tard chez Su BaoQuan.
- Su BaoQuan
- Wang HaoDa
Je n’ai plus eu de contact personnel avec Martin depuis cette époque, sauf un échange de mails au décès de Freya.
Aujourd’hui, en apprenant la nouvelle de la disparition de Martin, je suis affecté. Un compagnon de voyage a disparu. Un compagnon de voyage à la personnalité difficile, certes, mais plein d’énergie. Ce voyage dans lequel l’idéalisme de notre jeunesse nous avait engagés.
Avec sa disparition, une page se tourne. J’ai laissé se dissoudre mon ressentiment depuis longtemps. J’accueille aujourd’hui différemment sa terrible soif d’exister et de briller. Et je compatis à sa douleur au décès de Freya sa compagne, si effacée mais si sensible.
Je souhaite le meilleur à leur fils.
Vincent Béja